Le 11 février 2025 par La rédaction
Alors que les États-Unis persistent dans une approche solitaire et dérégulée du développement de l’intelligence artificielle, l’Europe affiche une ambition sans précédent au Sommet pour l’Action sur l’IA, organisé les 10 et 11 février à Paris. La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a profité de cet événement pour annoncer une augmentation massive des investissements européens à hauteur de 50 milliards d’euros supplémentaires, consolidant ainsi « le plus grand partenariat public-privé de l’Histoire pour une IA de confiance ».
Face à la domination américaine et chinoise, l’Union européenne refuse de se voir reléguée au rang de spectateur. « Trop souvent, j’entends dire que l’Europe est en retard dans la course, tandis que les États-Unis et la Chine ont déjà pris de l’avance. Je ne suis pas d’accord. La course à l’IA est loin d’être terminée. En vérité, nous n’en sommes qu’au début », a affirmé Ursula von der Leyen dans un discours offensif.
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ToggleL’Europe mise sur des « usines IA » pour renforcer son infrastructure technologique
Pour combler le retard en puissance de calcul, pierre angulaire du développement de l’IA, l’Union européenne prévoit de créer un réseau de gigafactories dédiées à l’intelligence artificielle. Ces infrastructures, financées à hauteur de 20 milliards d’euros, permettront aux entreprises et aux laboratoires de recherche d’accéder aux ressources nécessaires pour entraîner leurs modèles et accélérer l’innovation.
L’objectif est clair : démocratiser l’accès à la puissance de calcul et éviter que les start-ups européennes ne soient contraintes de se tourner vers des solutions américaines comme celles de Microsoft, Google ou Amazon. Ursula von der Leyen a insisté sur cette nécessité : « Notre ambition est de garantir que toute entreprise, quelle que soit sa taille, puisse disposer des capacités nécessaires pour exploiter pleinement l’IA. »
Actuellement, sept projets de supercalculateurs ont déjà été validés en Espagne, Italie, Finlande, Luxembourg, Suède, Allemagne et Grèce. La France, pourtant leader européen du cloud et de l’IA avec des acteurs comme OVH et Mistral AI, ne figure pas encore parmi les bénéficiaires de cette première vague d’investissements. Une situation qui pourrait évoluer avec les nouveaux financements annoncés.
Une coalition inédite de 60 grandes entreprises européennes
L’initiative publique européenne s’accompagne d’un engagement massif du secteur privé. La coalition « EU AI Champions Initiative », regroupant plus de 60 géants industriels et technologiques comme Airbus, Siemens, L’Oréal, Mercedes, Mistral AI et Spotify, a annoncé un investissement colossal de 150 milliards d’euros pour accélérer la recherche et le développement de l’IA en Europe.
Avec l’apport des 50 milliards d’euros de l’Union européenne, l’enveloppe globale atteint désormais 200 milliards d’euros, marquant un tournant dans l’ambition technologique du continent. Cette initiative se veut une réponse forte aux financements américains et chinois, qui ont jusqu’ici largement dominé l’écosystème IA mondial.
Vers une régulation plus agile pour encourager l’innovation
Outre les investissements massifs, cette alliance cherche à influencer la régulation européenne de l’IA. L’IA Act, bien que visant à garantir une IA éthique et de confiance, est souvent perçu comme un frein à l’innovation. Ursula von der Leyen a tenu à rassurer les acteurs économiques en affirmant que cet encadrement permettrait une harmonisation bénéfique : « L’IA Act fournit une seule liste de règles, et non pas 27 réglementations différentes. »
Toutefois, consciente des défis administratifs, elle a laissé entendre que des assouplissements pourraient être envisagés : « Il faut faciliter les choses, réduire les contraintes administratives, et nous le ferons. » Un message adressé directement aux entreprises, qui plaident pour une simplification réglementaire afin de ne pas se retrouver pénalisées face à leurs concurrents américains et chinois.
Un contexte géopolitique tendu entre régulation et domination
Ce sommet européen de l’IA intervient dans un contexte de tensions croissantes avec les États-Unis, où le vice-président JD Vance a réitéré le refus catégorique de toute régulation contraignante. Washington maintient sa stratégie agressive d’investissement privé et de contrôle des infrastructures stratégiques, renforçant ainsi la dépendance des entreprises mondiales aux solutions américaines.
En réponse, l’Europe joue la carte de la coopération et de la souveraineté technologique. En misant sur un écosystème de confiance, des infrastructures de calcul performantes et une régulation souple mais protectrice, l’Union espère attirer les talents et les investisseurs pour imposer un modèle alternatif au duopole sino-américain.
Le message du Sommet IA de Paris est clair : l’Europe ne veut plus être un simple marché de consommation pour les géants technologiques étrangers. Elle veut devenir un acteur central du futur de l’intelligence artificielle. Reste à voir si cette ambition pourra se concrétiser face à la pression concurrentielle et aux défis d’exécution qui l’attendent.
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